Les troubles du neurodéveloppement chez les enfants, un enjeu de santé publique
Troubles du spectre de l’autisme (TSA), trouble déficit de l’attention avec – ou sans – hyperactivité (TDAH), dyslexie mais aussi dyscalculie, dysorthographie, dyspraxie ou dysgraphie, troubles du développement intellectuel (TDI)… Dans les salles de classe, nombre d’enseignants ont le sentiment d’être face à un « envol »des cas. Du côté des médecins psychiatres, pédiatres et autres acteurs de la santé, on évoque les chiffres avec prudence, aussi parce qu’« il n’existe pas à proprement parler d’étude épidémiologique spécifique à la France et [qu’]il nous faut encore raisonner en transposant des études internationales à la situation démographique française », explique le médecin de santé publique Etienne Pot, nommé, en novembre 2023, délégué interministériel à la stratégie nationale pour les troubles du neurodéveloppement, ou « TND », les trois lettres qui renvoient à l’ensemble de ces affections.
Il n’empêche, par extrapolation d’enquêtes menées aux Etats-Unis, et convergeant avec d’autres résultats au Royaume-Uni, au Canada et en Australie notamment, les cliniciens font état d’une incidence forte. Et même, semble-t-il, de plus en plus forte : aux Etats-Unis, 17,8 % des enfants étaient affectés de TND durant la période 2015-2017, contre 16,2 % dans les années 2009-2011, selon l’étude du chercheur et statisticien en santé Benjamin Zablotsky publiée dans Pediatrics, en 2019, qui fait référence.
Dans de nombreux pays depuis une vingtaine d’années, la prévalence de ces troubles semble suivre une tendance haussière, particulièrement pour les TSA et TDAH. Au point qu’on évoque, sur le terrain, jusqu’à une personne sur six qui pourrait être concernée. Un enjeu de santé publique.
« Les données épidémiologiques donnent un peu le vertige », avait affirmé Claire Compagnon, prédécesseure d’Etienne Pot au poste de délégué interministériel, intervenant devant l’Académie de médecine au printemps 2023. Trouble par trouble, le sentiment se confirme : selon l’Inserm, les TSA touchent 700 000 personnes, dont 100 000 mineurs environ. Pour le TDAH, entre 3 % et 6 % des enfants seraient concernés ; pour les troubles « dys », entre 4 % et 5 % d’une classe d’âge… « On estime aussi que un trouble du neurodéveloppement sur deux est associé à un autre », observe Etienne Pot. Des « co-occurences », dit-il encore, qui confirment la nécessité d’un dépistage « le plus précoce possible ».
Dépistages en hausse
C’est l’orientation confirmée dans la nouvelle stratégie 2023-2027 annoncée par l’exécutif, en novembre 2023, et qui, après quatre plans autisme, a officiellement élargi le champ de l’action publique à l’ensemble des troubles TND, en misant notamment sur un repérage « systématique » des écarts de développement de la naissance à 6 ans.
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