Industrie automobile : ces deux géants vont peut-être fusionner
Le secteur automobile pourrait bientôt assister à un bouleversement majeur. Deux piliers de l’industrie japonaise discutent actuellement d’une fusion stratégique selon les informations du journal Nikkei. L’objectif : s’adapter aux transformations rapides du marché et renforcer leur position sur le segment des véhicules électriques (VE).
Les deux constructeurs sont bien connus, y compris ici en France. Ils ont dans leur histoire des modèles mythiques, comme la Skyline ou encore la Civic dont la version « Type R » fait partie des modèles sportifs les plus connus au monde.
Deux entreprises, deux trajectoires différentes
Honda : Une transition ambitieuse mais prudente
Honda, connu pour des modèles populaires comme la Civic, la CR-V et les motos Goldwing, a toujours cultivé une image de fiabilité et de pragmatisme. Cependant, l’entreprise a tardé à adopter une stratégie globale pour les véhicules entièrement électriques, préférant se concentrer sur les hybrides.
En 2022, les hybrides représentaient près de 40 % des ventes domestiques de Honda, ce qui a ralenti son développement sur le marché électrique pur. Toutefois, la marque a depuis adopté une approche plus agressive, annonçant en mai 2024 un plan d’investissement de 65 milliards de dollars dans l’électrique. Son prototype Prologue, développé avec General Motors, témoigne de ses efforts pour s’imposer sur ce segment. Honda vise désormais un portefeuille 100 % électrique d’ici 2040, avec des modèles capables de rivaliser avec des références comme la Tesla Model Y ou la BYD Seal.
Nissan : Un précurseur fragilisé
De son côté, Nissan a été un pionnier des véhicules électriques avec la Leaf, lancée en 2010, qui a longtemps été la voiture électrique la plus vendue au monde. Plus récemment, Nissan a introduit l’Ariya, un SUV électrique qui combine une autonomie compétitive (environ 500 km selon le cycle WLTP) et des technologies avancées, comme son système e-4ORCE pour une gestion intelligente des quatre roues motrices.
Cependant, Nissan a été marqué par des turbulences internes et des difficultés financières. L’affaire Carlos Ghosn et la réorganisation de son partenariat avec Renault ont freiné ses ambitions. De plus, l’entreprise a vu ses ventes s’effondrer sur des marchés clés comme la Chine et les États-Unis. Entre mars et septembre 2024, son revenu opérationnel a plongé de 90 %, une situation qui rend une alliance avec Honda d’autant plus stratégique.
La fusion Honda-Nissan : une réponse au bouleversement mondial du marché
La pression du marché mondial est l’un des principaux moteurs de ce rapprochement. La montée en puissance des marques chinoises, comme BYD et Nio, combinée à la domination de Tesla, laisse peu de place aux constructeurs traditionnels pour évoluer seuls. En 2023, la Chine est devenue le premier exportateur mondial de véhicules, dépassant le Japon. Les consommateurs chinois favorisent les véhicules électriques domestiques, offrant un meilleur rapport qualité-prix.
La fusion permettrait à Honda et Nissan de mutualiser leurs ressources pour rattraper leur retard technologique. Par exemple, Honda pourrait bénéficier des avancées de Nissan en matière de batteries solides, tandis que Nissan pourrait tirer parti des capacités de production de Honda pour réduire ses coûts.
Le partenariat viserait à développer des technologies communes dans plusieurs domaines :
- Plateformes électriques : Une plateforme modulaire partagée pourrait réduire les coûts de production et accélérer le lancement de nouveaux modèles.
- Batteries solides : Nissan travaille sur des batteries solides plus légères et plus performantes, tandis que Honda prévoit d’intégrer ces technologies dans ses modèles dès 2028.
- Connectivité : Les deux entreprises collaboreraient sur des systèmes de conduite autonome et des logiciels de gestion intelligente, alignés avec les normes des marchés européens et asiatiques.
La culture d’entreprise à la japonaise : un frein à une fusion réussie ?
Si la fusion peut paraître stratégique, elle n’en reste pas moins complexe. Honda et Nissan possèdent des cultures d’entreprise très différentes. Honda, souvent perçu comme conservateur, privilégie une gestion en interne et une production rationalisée. Nissan, plus audacieux, a adopté une approche mondiale et s’est souvent appuyé sur des partenariats externes, notamment avec Renault et Mitsubishi.
Un autre défi réside dans la gestion des gammes de produits. Nissan et Honda proposent des modèles qui, bien que complémentaires sur certains segments, se chevauchent sur d’autres. Par exemple, comment positionner les SUV électriques comme le Honda Prologue et le Nissan Ariya sur les mêmes marchés sans cannibaliser les ventes ?
L’annonce des pourparlers a provoqué des réactions immédiates sur les marchés financiers. L’action de Nissan a bondi de 24 %, tandis que celle de Honda a reculé légèrement, signe que les investisseurs voient davantage de risques pour Honda dans cette opération. À court terme, l’enjeu sera de convaincre les actionnaires des deux entreprises que cette fusion est bénéfique pour tous.
Un géant de l’industrie automobile pourrait naître
Une fusion entre Honda et Nissan pourrait créer le quatrième plus grand constructeur automobile mondial, avec une capacité de production combinée dépassant les 10 millions de véhicules par an. Cela permettrait à l’entité commune de rivaliser avec des géants comme Stellantis, Toyota et Volkswagen, non seulement sur les marchés traditionnels mais aussi sur les segments électriques et autonomes. L’opération entre Nissan et Honda créerait en effet un groupe valorisé plus de 45 milliards de dollars en Bourse, tout juste un peu moins que la valorisation de Stellantis lors de sa création en 2021 (52 milliards).
Une réaction ? Laissez un commentaire
Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre Newsletter gratuite pour des articles captivants, du contenu exclusif et les dernières actualités.