Pourquoi avons-nous tendance à reprendre les kilos perdus?
Thomas Messias – 20 novembre 2024 à 13h55
Si tous nos efforts sont parfois réduits à néant en quelques semaines, nous ne sommes pas forcément responsables.
Temps de lecture: 2 minutes - Repéré sur New Scientist
Lorsque l'on souhaite perdre du poids, que ce soit pour des raisons de santé ou pour nous conformer à certains critères esthétiques, il est fréquent qu'après une chute du nombre de kilogrammes affiché par la balance, ce chiffre finisse par remonter peu à peu. Cela peut donner l'impression que les efforts effectués (changement d'alimentation, activité sportive plus régulière, opération chirurgicale…) n'ont servi à rien.
Peu à peu, la science comprend mieux les raisons de cet effet yo-yo, qui peut être passablement décourageant pour celles et ceux qui ne parviennent pas à se stabiliser. Selon New Scientist, il n'y a peut-être pas grand-chose à faire, si ce n'est tenter d'accepter sa condition, puisque le retour des kilos perdus (ou en tout cas d'une partie d'entre eux) pourrait essentiellement être dû à des changements durables de l'ADN et de l'ARN des cellules adipeuses, qui stockent la graisse dans le corps.
Le média scientifique cite notamment une étude affirmant qu'environ 85% des personnes en qui perdent au moins un dixième de leur poids le reprennent dans l'année qui suit. Cela peut en partie s'expliquer par le fait qu'il est difficile de maintenir un régime hypocalorique sur une longue période, mais cette explication n'est pas totalement satisfaisante, expose Laura Catharina Hinte, de l'École polytechnique fédérale de Zurich.
Mémoire génétique
D'après la spécialiste, si le problème était uniquement lié à la difficulté de pérenniser un régime alimentaire sain voire austère, le pourcentage ne serait pas aussi élevé: «Il est impossible que nous n'ayons pas tous assez de volonté pour maintenir le poids perdu.» D'autres raisons peuvent être évoquées, dont le fait que le cerveau peut considérer une forte baisse de l'indice de masse grasse comme dangereuse. Les études montrent qu'en réaction, il se comporte alors en faisant en sorte que l'organisme brûle moins d'énergie.
Avec son équipe, Laura Catharina Hinte a étudié le tissu adipeux de vingt personnes, qui leur a été prélevé juste avant l'opération bariatrique qu'elles ont subie –il s'agit d'une intervention visant à rétrécir l'estomac afin de faire survenir plus vite le sentiment de satiété. À des fins de comparaison, un nouveau prélèvement a ensuite été effectué deux années plus tard sur ces personnes ayant perdu au moins un quart de leur masse initiale. Dans le même temps, des prélèvement similaires ont été réalisés sur dix-huit personnes ayant un IMC considéré comme normal.
Les chercheurs ont remarqué que, deux ans après les premiers prélèvements, il existait toujours des différences très notables entre la quantité des molécules d'ARN (responsables du codage des protéines) présentes chez les personnes obèses (ou ex obèses) et celle relevée chez les autres. Leur conclusion est la suivante: les changements de tendent à faire durablement augmenter l'inflammation des cellules adipeuses et à perturber la façon dont celles-ci stockent et brûlent les graisses.
Des tests complémentaires effectués par la même équipe sur des souris montrent également que celles qui avaient connu des pertes de poids conséquentes étaient davantage susceptibles de reprendre des kilos. À régime alimentaire similaire, les souris précédemment obèses ont repris 14 grammes par mois, contre 5 grammes pour les autres.
Pour finir, les scientifiques ont découvert que les marqueurs moléculaires, ou marques épigénétiques, présents sur l' des cellules adipeuses, semblaient être à l'origine des modifications de l'ARN liées à l'obésité. Cela confirme qu'à l'avenir, la recherche devrait se concentrer davantage sur la mise au point de médicaments ciblant l'épigénétique, c'est-à-dire la façon dont l'environnement peut modifier le fonctionnement des gènes. Cela pourrait constituer une aide efficace pour lutter contre les prises de poids intempestives.