« 2046 » : une valse des romances malheureuses orchestrée par Wong Kar-wai
Vingt ans après sa sortie, 2046 revient sur les écrans à la faveur d’une restauration 4K (ultra-haute définition) qui relance cet objet baroque, grande cage de reflets où tourbillonnent impressions du passé et visions du futur. Sorti en 2004, le film marquait alors un état limite du cinéma de Wong Kar-wai, un stade de cristallisation esthétique fascinant, mais inquiétant dans son absolutisme.
On sait en effet la propension du cinéaste hongkongais, grand obsessionnel, à se perdre dans ses propres films, à s’enliser dans les méandres de tournages sans fin. Le film 2046 est ainsi sorti de la cuisse d’In the Mood for Love (2000), ses prises de vues ayant commencé en même temps parmi les mêmes personnages, avant d’en passer par quatre ans de spasmes et d’intermittences. Jusqu’à frôler l’accident au Festival de Cannes, où ses projections ont d’abord été annulées avant que le film n’arrive in extremis. C’était en outre le dernier film ouvertement hongkongais du cinéaste, au moment où la péninsule perdait son régime spécial.
Alors que sa gestation laissait augurer un film noueux, labyrinthique, 2046 se dévoilait sous un tout autre visage, semblable plutôt à un recueil de nouvelles avec son récit en pointillé. Après s’être ruiné dans les tripots de Singapour, M. Chow (Tony Leung au paroxysme de l’élégance), journaliste en mal de piges, revient à Hongkong en 1966, période de grèves, de manifestations, bientôt de couvre-feu. Il s’enferme à l’Oriental Hotel pour écrire un roman futuriste intitulé 2046, d’après le numéro de la chambre d’en face.
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